Solidaire mais pas forcément d'utilité sociale : focus sur l'agrément "Entreprise solidaire d'utilité sociale"

La loi ESS de 2014 a reconnu et doit renforcer le secteur de l’Économie Sociale et Solidaire sur bien des aspects à condition que celui-ci se l’approprie. Pour exemple, l’agrément « Entreprise solidaire » est remplacé depuis 2016 par l’agrément « Entreprise solidaire d’utilité sociale » dit ESUS. Cette évolution n’est pas anodine puisque le nouvel agrément ne sera pas attribué systématiquement aux entreprises remplissant les conditions qui leur permettaient d’être jusqu’alors reconnues comme « Solidaires ».

Ce que dit la loi ESS sur le nouvel agrément ESUS
L’agrément ESUS est encadré par deux articles de la loi ESS de  2014 : l’article 1 qui définit les acteurs de l’ESS et l’article 11 relatif à l’agrément en tant que tel.

Article 1

L’économie sociale et solidaire est composée des activités de production, de transformation, de distribution, d’échange et de consommation de biens ou de services mises en œuvre :

1° Par les personnes morales de droit privé constituées sous la forme de coopératives, de mutuelles ou d’unions relevant du code de la mutualité ou de sociétés d’assurance mutuelles relevant du code des assurances, de fondations ou d’associations régies par la loi du 1er juillet 1901 […].

2° Par les sociétés commerciales qui, aux termes de leurs statuts, [remplissent un certain nombre de condition]

 Article 11

Peut prétendre à l’agrément « entreprise solidaire d’utilité sociale » l’entreprise qui relève de l’article  1er […] et qui remplit les conditions cumulatives suivantes :

1° L’entreprise poursuit comme objectif principal la recherche d’une utilité sociale, définie à l’article 2 de la même loi ;

2° La charge induite par son objectif d’utilité sociale a un impact significatif sur le compte de résultat ou la rentabilité financière de l’entreprise ;

3° La politique de rémunération de l’entreprise [limite les écarts de rémunération] 4° Les titres de capital de l’entreprise […] ne sont pas admis aux négociations sur un marché d’instruments financiers, français ou étranger […]

5° Les conditions mentionnées aux 1° et 3° figurent dans les statuts. »

ESUS, un agrément à la fois plus large et plus restrictif

Ainsi l’agrément « Entreprise solidaire d’utilité sociale » s’ouvre d’un côté à de nouveaux acteurs puisque la loi intègre dans le périmètre de l’économie sociale et solidaire les entrepreneurs sociaux sous statut de sociétés commerciales, les rendant aujourd’hui éligibles à l’agrément et se ferme à certains acteurs historiques de l’ESS qui ne sauraient donner la preuve de leur utilité sociale.

Pourquoi demander l’agrément ESUS ?

S’il permet déjà de communiquer positivement autour de son utilité sociale grâce à la « marque » ESUS, le nouvel agrément permet également d’accéder à nombre de dispositifs publics (services civiques, réductions fiscales pour les donateurs, dispositifs locaux d’accompagnement (DLA)) ainsi qu’à certains financements de la BPI France et de la Caisse des Dépôts tout comme à ceux issus de l’épargne solidaire. Pour exemple, le réseau France active demande aux structures qui le sollicitent pour un apport de trésorerie d’être agréées.

Comment obtenir l’agrément ESUS ?

Une fois que l’on a pris connaissance de l’existence de ce nouvel agrément et compris l’intérêt de son obtention, il reste à en faire la demande. Pour cela, les entreprises doivent remplir deux conditions à savoir appartenir au secteur de l’ESS et prouver l’utilité sociale de leurs activités. Les acteurs historiques de l’ESS appartiennent d’office au secteur de l’économie sociale et solidaire de par leur statut (associatif, coopératif…). Cependant pour nombre d’entre elles, leurs activités ne sont pas automatiquement considérées comme d’utilité sociale ; l’obtention de l’agrément n’est donc pas assurée.

En pratique : prouver que l’on appartient à l’ESS

Comme indiqué précédemment, les associations, coopératives, mutuelles et fondations font parties de par leur statut du secteur de l’ESS (cf article 1 de la loi ESS) et n’ont qu’à transmettre une copie de leur statut. Les sociétés commerciales doivent, pour leur part, prouver leur appartenance à l’ESS en inscrivant dans leurs statuts (et donc dans leurs pratiques), leur utilité sociale, leur gouvernance démocratique, l’obligation de mise en réserve, l’impartageabilité de leurs réserves et l’interdiction d’amortissement et de réduction de leur capital.

En pratique : prouver que son activité a un impact social significatif 

C’est à partir de ce point que les choses se complexifient pour bonne partie des acteurs de l’ESS. En effet seul un certain nombre restreint de structures du secteur social sont considérées d’office comme répondant à ce deuxième critère d’utilité sociale et n’ont qu’à prouver de leur appartenance à la liste des structures citées dans l’article 11- II de la loi ESS (Entreprise d’insertion ; • Entreprise de travail temporaire d’insertion ; • Association intermédiaire ; • Atelier et chantier d’insertion ; • Organisme d’insertion sociale relevant de l’article L. 121-2 du code de l’action sociale et des familles ; • Service de l’aide sociale à l’enfance ; • Centre d’hébergement et de réinsertion sociale ; Régie de quartier ; • Entreprise adaptée ; • Centre de distribution de travail à domicile; • Etablissement ou service d’aide par le travail • Organisme agréé parmi ceux mentionnés à l’article L. 365-1 du code de la construction et de l’habitation ; • Association ou fondation, reconnue d’utilité publique et considérée comme recherchant une utilité sociale au sens de l’article 2 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 précitée ; • Organisme agréé mentionné à l’article L. 265-1 du code de l’action sociale et des familles ; • Etablissement ou service accompagnant et accueillant des enfants et des adultes handicapés parmi ceux mentionnés aux 2°, 3° et 7° du I de l’article L. 312-1 du même code.).

Pour les autres, il faudra s’armer de son stylo et aiguiser ses arguments pour démontrer l’utilité sociale de son activité. Ainsi commence comme bien souvent la litanie associative inhérente aux dossiers que l’on remplit pour dialoguer avec les partenaires publics. Préparez-vous à exposer « votre activité d’utilité sociale », « les besoins socio-économiques auxquels elle répond », « les publics bénéficiaires et leurs caractéristiques », « les moyens mis en œuvre », « le territoire d’action »… et à en faire le la démonstration économique de leur part significative dans vos comptes. Une fois de plus vous n’échapperez pas aux exigences de professionnalisation du secteur !

Si vous bloquez, contactez les référents de la Direccte ou de la CRESS de votre région. Ils ont peu de temps dédié au sujet mais seront de bons conseils. Vous entrerez de toute manière en contact avec eux pour obtenir le bon dossier d’agrément (il y a en a 4 différents) et vous en référerez à leur expertise pour l’instruction de votre dossier.

Si vous êtes trop pris ou avez une phobie administrative et préférez déléguer la constitution de votre demande d’agrément, vous pouvez aussi faire appel à un prestataire externe pour vous accompagner dans la rédaction de votre dossier.

Quelques liens utiles :

http://www.tresor.economie.gouv.fr/14662_agrement-esus

http://www.cncres.org/accueil_cncres/actualites_/813_521/tout_savoir_sur_lagrement_esus

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